Allaitement et consommation d'alcool

13/12/2021

Voix d'experts - Allaitement maternel et consommation d'alcool : Quels sont les risques ?

M. Manard

Quelques études et revues de littérature ... Aucun véritable consensus...

Dans une revue de littérature scientifique, certains chercheurs ont relevé la présence d'effets délétères de la consommation d'alcool au cours de l'allaitement [1]. En effet, la consommation d'alcool aurait tendance à inhiber (supprimer/réduire) le réflexe d'éjection du lait, provoquant une baisse temporaire de la disponibilité de lait. Cependant, en termes de "contamination", le lait de la mère consommatrice d'alcool contiendrait environ la même concentration que son sang. Ainsi, les auteurs ne font pas de recommandation particulière ou différente de celles prodiguées pour tout adulte concernant la consommation d'alcool en cours d'allaitement.

Depuis cette revue, certaines études se sont penchées sur les effets plus "discrets" de la consommation d'alcool au cours de l'allaitement [2, 3]. Certains auteurs ne relèvent pas d'effet d'une consommation légère d'alcool en termes de durée d'allaitement, d'alimentation de l'enfant ou de sommeil à l'âge de huit semaines. Ils n'observent pas non plus de conséquence sur le développement, ni à huit semaines ni à un an [2]. Par contre, une autre étude observe un risque pour le développement de l'enfant en cas de consommation d'alcool pendant l'allaitement. Plus précisément, à l'âge de sept ans, les enfants de mères consommatrices d'alcool en cours d'allaitement présentaient environ six fois plus de risques de développer des difficultés physiques, cognitives et comportementales que les enfants de mères évitant de consommer des boissons alcoolisées. Les auteurs concluent donc qu'il est préférable d'éviter de consommer de l'alcool au cours de l'allaitement, et particulièrement d'éviter le binge drinking (consommation élevée sur de courtes périodes) et d'autant plus si l'enfant a été exposé à de l'alcool au cours de la grossesse [3]. Confirmant cette étude, bien que de façon un peu plus modérée, une recherche plus récente met en évidence un effet de la consommation d'alcool sur les capacités cognitives. Cet effet serait par ailleurs dépendant de la dose d'alcool ingérée par la mère [4].

Dans une autre revue de littérature, les effets observés de la consommation d'alcool en cours d'allaitement incluent des modifications du sommeil, une réduction de la production et du flux de lait maternel, une moindre quantité de lait ingérée et une altération des fonctions immunitaires [5].

Quels sont les points clés à retenir ? [6]

L'effet de la consommation d'alcool au cours de l'allaitement serait dépendant du profil de consommation. Comme décrit précédemment, la consommation d'alcool va altérer la production et le débit de lactation jusqu'à ce que les taux d'alcool chez la mère diminuent.
La concentration d'alcool dans le lait maternel est très proche des taux sanguins de la mère, avec un pic du taux dans le lait environ 30 à 60 minutes après la consommation de la boisson alcoolisée. Notons que ce délai peut être différé par l'ingestion de nourriture.
Allaiter (ou exprimer le lait) dans l'heure suivant la consommation de la boisson alcoolisée pourrait réduire la quantité d'alcool dans le lait par la suite.
Allaiter un enfant après la consommation d'un ou deux verres d'alcool peut entrainer une diminution de consommation du lait par l'enfant d'environ 20% et lui causer une agitation ou des difficultés de sommeil.
Une consommation modérée (d'un verre d'alcool par jour par exemple) ne semble pas causer d'effets délétères sur l'enfant, surtout si un délai de deux heures ou deux heures et demi peut être respecté avant de nourrir à nouveau l'enfant.
Une consommation élevée d'alcool (plus de deux verres par jour) semble avoir une influence sur la durée de l'allaitement. Un effet est également observé sur l'enfant avec une tendance à la somnolence, à la rétention de fluides et des déséquilibres hormonaux.
Les effets sur le développement restent contradictoires dans les recherches. Certaines études déclarant un effet délétère sur le développement physique, moteur et intellectuel à partir d'un verre d'alcool quotidien alors que d'autres études n'observent pas de tels résultats.

Conclusion

Le but de cet article n'est pas de vous inciter ou non à consommer de l'alcool. En ces périodes de fêtes, il est possible que vous soyez tentée par une petite coupe ou un dessert contenant de l'alcool. Cet article met juste à disposition les données récentes sur le sujet. Les effets à long terme restent débattus et la méthodologie de ce genre d'études est très complexe. En effet, de nombreux facteurs entrent en jeu, tels que la qualité ou l'hygiène de vie, les interactions parentales, la qualité d'attachement, le type de maternage/parentage, ... Autant de facteurs pouvant également moduler le développement de l'enfant et être influencés par la consommation éthylique.

Tant que la consommation reste très modérée et exceptionnelle, il semble qu'il n'y ait pas lieu de s'inquiéter, alors que vous choisissiez une parfaite abstinence ou que vous vous octroyez un petit écart, profitez bien de vos fêtes.

Alors Merry Milk'mas et happy boobs'year !

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